| Le réel est ivre tel la Pythie. Mais le projet, quoique se mouvant
de biais au travers du réel est d'une toute autre ivresse. Il interprète.
Dans l'hypnose, la suggestion - le projet déposé
au creux de l'inconscient - persiste et signe à tout instant
dans l'interprétation. Elle se faufile, s'empare des miettes de
réel qui la servent, joue sur les mots, chevauche les images et
se glisse masquée sous les actes.
Imperceptible de l'intérieur, ce cheminement n'existe que dans
la perspective externe de l'auteur de la suggestion - du projet.
Qui n'est pas averti de la présence de la suggestion n'a pas les
clefs et erre.
Mais qui erre au juste?
Tout ce qui est dit, dans l'inconscient comme ailleurs n'est jamais
signe que d'un projet. Si ténu soit-il. Rien n'a de
sens que par perspective.
La paranoïa critique est toujours à l'oeuvre. Mais il n'existe
pas d'interprétations délirantes ou bien elles le sont toutes.
En existe-t-il seulement d'erronées?
Pour le projet, comme pour la mentalité primitive, magique parce
qu'hallucinée de technique, aucune coïncidence n'est plus gratuite.
Rien n'est laissé au hasard. Tout soudain s'ordonne.
Mais la science n'est-elle pas pareillement hallucinée de magie
en son désir de ne rien laisser hors de son interprétation
?
L'oracle comme l'inconscient ou les suggestions qui le traversent -
qu'elles soient empreintes que nous sachions, ou bien plus vertigineusement,
spontanées peut-être - chemine dans le réel jusqu'à
trouver sa réalisation. Serpent d'étrange et longue sagesse,
il s'insinue, subvertissant le sens des mots sur son passage.
Il erre, comme les dieux ont soif. C'est vraiment du fond de l'hypnose
qu'il agit.. |